Les usages
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Malgré la prédominance des textes écrits, le droit commercial accorde une place importante aux usages.
En l’absence de définition légale, on s’accorde pour les définir comme « des pratiques professionnelles anciennes et constantes que les commerçants d’un milieu déterminé suivent habituellement dans leurs relations commerciales et auxquels ils donnent une force obligatoire ». Exemple de jurisprudence récente : Com. 7 novembre 2006 (D. 2007, n°3, p. 151). En l’espèce, un mareyeur était poursuivi devant le tribunal correctionnel car il lui était reproché d’utiliser des techniques conduisant à une altération des qualités substantielles de certains fruits de mer vendus. Pour échapper aux poursuites, il se fondait sur un usage propre à la profession, usage selon lequel de telles techniques étaient utilisées par d’autres professionnels. La Cour de cassation, après les premiers juges, a rejeté cette argumentation car il était, en réalité, établi que cette technique n’était « ni constante, ni généralisée » se sorte qu’elle ne saurait être considérée comme un usage. Sur le plan strictement juridique, la doctrine distingue classiquement les usages conventionnels (ou de fait), des usages de droit.
Le fondement des usages conventionnels est à rechercher dans l’article 1160 du Code civil qui dispose « qu’on doit suppléer dans le contrat les clauses qui y sont d’usage, quoiqu’elles n’y soient pas exprimées ». Autrement dit, lorsque les parties n’ont, sur un point particulier, conventionnellement rien prévu, dans la convention les liant, les usages (s’ils existent, bien entendu) ont vocation à recevoir application. Dans le silence du contrat, il est ainsi considéré que les parties ont souhaité être soumises aux principes ordinairement appliqués tous et, par conséquent, aux usages s’ils en existent.
En pratique, les usages conventionnels sont ceux qui, par exemple, vont fixer des délais d’exécution, de paiement ou encore des quantités indivisibles de marchandises. Ils ont généralement un champ d’action limité ; le plus souvent ils s’appliquent au niveau local.
De leur nature conventionnelle, découle un certain nombre de conséquences juridiques. Ils ne peuvent d’abord pas déroger aux lois impératives. Ils ne peuvent ensuite recevoir application qu’entre les commerçants contractants et ne sauraient être opposés, sauf accord exprès, à un noncommerçant ou à un autre commerçant si celui-ci agit en dehors de sa sphère habituelle d’activité. Il appartient, en outre, à celui qui souhaite s’en prévaloir de démontrer leur existence et leur contenu. La preuve peut se faire par tous moyens mais il est possible d’utiliser des attestations appelées « parères » qui sont délivrées par les Chambres de commerce et les organismes professionnels. Enfin, les usages conventionnels font l’objet d’une appréciation souveraine de la part des juges du fond ; leur violation ou leur méconnaissance ne donnent pas lieu à ouverture à cassation.
Les usages de droit, pour leur part, évoquent la coutume au sens du droit civil. Ils présentent, en effet, un caractère général, ils sont applicables à tous les contrats et en tout lieu. Le principe de solidarité entre codébiteurs d’un engagement commercial, la règle dite de la « réfaction » d’un contrat, ou bien encore les principes applicables à « l’anatocisme » en matière commerciale, en sont des exemples.
Ces usages peuvent compléter la loi sur certains points, la suppléer et même, dans certains cas, lui être contraires. L’usage selon lequel la solidarité est présumée entre commerçants codébiteurs déroge, par exemple, à l’article 1202 Code civil.
Ces usages de droit n’ont toutefois pas une force absolue : ils n’ont pas une valeur obligatoire pour les commerçants qui peuvent toujours en écarter l’application.
Les juges sont censés les connaître de sorte que la partie qui les invoque n’a pas à en rapporter la preuve. Ils n’échappent pas, à la différence des usages conventionnels, au contrôle de la Cour de cassation.